Crise d'adolescence : de la dépendance à l'autonomie.
- Alexandre Jerome
- 27 nov. 2019
- 11 min de lecture

S'il ne répond pas aux questions que vous lui posez, ne vous confie plus rien, est grossier avec vous, vous dit qu'il se sent incompris, s'il s'enferme dans sa chambre, vous critique... Rassurez-vous, c'est normal!
La crise d’adolescence est une crise d’indépendance, un jour ou l’autre, notre jeune rejette ce que nous, parents, figures d’autorité et d'attachement, lui avons appris ; il se révolte, et veut prendre son indépendance et faire ce qu’il veut, comme il veut. Il se prépare juste à quitter les amarres du cocoon familial, pour partir à la conquête du monde. Et s'engager dans l'expédition de sa vie, ça nécessite une préparation que l'on nomme l'Adolescence!
La crise d'adolescence est un stade de développement que chaque être humain traverse un jour, c'est une étape sensible du développement de la personnalité, qui se situe entre l’enfance et l’âge adulte. Son début est déclenché par des modifications psychologiques et biologiques, et sa fin reconnue par l’intégration sociale et culturelle, l'Enfant est transformé en Adulte, phase qui marque son entrée dans le monde de l'autonomie et de la responsabilité.

L'Adolescence :
un rite de passage initiatique ?
Dans des temps plus anciens, les sociétés traditionnelles intégraient le jeune dans la vie adulte au travers de rites d’initiation. Les adultes leur transmettaient un savoir-faire, des codes sociaux et les inscrivaient dans une histoire familiale, culturelle, religieuse et sociale stable. Cette transmission ayant disparue, la jeunesse actuelle se retrouve dans une perte de repère sur la façon dont on devient enfin un Homme ou une Femme.
Durant les premières années de la vie, la famille et surtout la relation parents / enfant constitue un socle solide sur lequel l'enfant peut s'appuyer pour trouver à la fois des modèles d'apprentissage, au travers de la relation mimétique qui les unit ; mais aussi des « partenaires d'exercices et d'exploration » de ses propres capacités à se sociabiliser, se confronter au contraintes de la vie, et développer ses forces mentales pour se prendre prochainement en charge lui-même, le tout dans un cadre sécurisant et juste.
Avant de devenir un Adulte, il faut franchir " l'initiation" de adolescence. C’est en fonction de la bonne résolution de cette étape que l’adolescent deviendra un adulte responsable et autonome.

Parents, adolescents,
une relation affective indispensable.
Des études statistiques montrent que les adultes manifestent une attitude sensiblement plus négative vis à vis des adolescents que ces derniers à leur égard. C'est bien connu en psychologie, que le passage vers la vie adulte pose des difficultés. L’adolescence de leurs enfants ramène les parents à leur propre adolescence. Ils sont tentés de projeter leurs propres idéaux sur eux sous forme d' injonctions et de coaching parental bien souvent étouffant. Les parents revivent les conflits non-résolus de leur propre crise d'adolescence dans la relation présente à leurs enfant; avec toute l'intensité, la tension et l'angoisse de l'époque; donnant lieu à une sorte de fantasme d'un idéal à transmettre. Il devient donc complexe de gérer cette relation pour les parents, car de leurs côtés, ils découvrent que leurs quête de parentalité idéalisé n'est qu'un leurre, une stratégie inefficace. Pour l'adolescent, ce forcing, peut s'avérer être vécu comme une véritable pénitence, comme un séjour en prison... Pouvant le mener à agressivité plus forte, une dépression; on peut même constater, dans le pire des cas, l'apparition d' une tendance anti-sociale à la destruction, ou à l'autodestruction. Les adolescents ont besoin en priorité de relations parentales caractérisées par la proximité et l’affection. L'ado a besoin de se sentir libre dans ses pensées et ses actes, tout en sachant que s'il éprouve une difficulté, ses parents sont là pour lui.
L’autorité parentale ne peut jouer son rôle sécurisant et éducatif que si le jeune se sent aimé, reconnu et accepté par sa famille.

Les 5 phases
qui caractérisent
la crise d'ado :
La phase de la dépendance : L’enfant nait dépendant de ses parents pour l’accomplissement de ses besoins primaires : se nourrir, s’hydrater, dormir, être en bonne santé et être propre. Ceux veilleront aussi à sa sécurité physique et psychologique.
L’enfant grandira en se sentant aimé, reconnu et accepté par sa famille. La dépendance est une phase de soumission à l’autre, l’autorité est responsable des choix, des décisions et des actions. La personne dépendante, l’enfant a besoin des autres pour obtenir ce qu’elle veut.
A l’adolescence, le jeune est prêt à quitter progressivement cet état de passivité, à faire le deuil d’une certaine sécurité parentale pour prendre le chemin de la connaissance du « je » en testant l’opposition de la dépendance, il accède dans la phase suivante.
La phase dite d’opposition : Elle survient chez la fille entre 12 et 13 ans et chez le garçon entre 12 et 15 ans. Elle commence par une période de régression au cours duquel les adolescents vont avoir tendance à être imprévisible, à s’opposer aux règles, à questionner ce qui leur semblait aller de soi durant l’enfance. L’adolescent entre en rébellion, il rejette tout ce que ses parents lui ont appris. Cette tendance à se démarquer permet également de se construire par opposition, grâce à se cela, l'ado renforce sa capacité future à se positionner dans avec les autres, à s'affirmer dans la vie. Enfin, cette période correspond à une plus grande conscience de soi, là où l’enfant avait plus tendance s'identification à ses parents, il commence à devenir lui-même.
Cette étape de recherche se caractérise par de l’égoïsme, de la colère, des critiques et jugements envers l’éducation reçue amenant des relations conflictuelles.
L’adolescent est tiraillé dans un combat intérieur entre ses doutes et ses premiers pas dans l’inconnu, il procède par essais et erreurs. C'est une phase de révolution, d’apprentissage de dire non, de tester les limites inculquées en rejetant les béquilles de l’autorité.
La phase dite « d’affirmation du moi » : Elle a lieu chez la fille entre 13 et 16 ans, et chez le garçon entre 15 et 17 ans. C’est une période de revendication, où le « Je veux ! » succède au « Je ne veux pas ! ». Elle correspond à une plus grande demande d’indépendance et de liberté. On parle alors souvent de conflit des générations et beaucoup d’adolescents ont alors tendance à interroger le système de valeurs qui leur a été transmis, la façon de voir des parents, il n'est pas rare de constater qu'un ado trouve ses parents vieux ou ringards.
Passé cette tempête intérieure et extérieure, l’adolescent s’affranchit des conflits ; un nouvel équilibre est trouvé dans la dynamique familiale. Le jeune, fort de ses nouvelles découvertes sur lui, est prêt à entrer dans la phase d’indépendance, et d’unicité avec Soi.
La phase d’indépendance : Elle survient chez la fille entre 16 et 18 ans, et chez le garçon entre 18 et 20 ans. C’est souvent une période où l'ado idéalise de moins en moins ses parents, laissant place à une véritable construction de ses propres idéaux . L’adolescent trouve son indépendance affective, c'est l'époque des premiers amours... Il construit son indépendance économique, c'est l'époque des premiers petits jobs. Il commence à accepter réellement de se passer de ses parents. L’indépendance est une phase de séparation durant laquelle le jeune peut avoir envie de tout plaquer, de prendre une décision unilatérale de sa vie.
Pour les parents, la difficulté de cette étape consiste à accepter que leur enfant leur échappe et faire le deuil de la maitrise à l’égard de sa vie.
La phase d'interdépendance: Cette phase termine le processus d’accès à l’autonomie véritable, le jeune adulte passe du « je » au « nous ». Il s’accepte tel qu’il est, dans la pleine puissance de sa personnalité découverte. Le jeune adulte entre en interaction pour combiner ses talents, ses capacités et les mettre au service de la collectivité, il est dans l’acceptation de soi et de l’autre, avec ses différences et ses singularités. L’interdépendance est une phase de libération du soi, d’interactions au service d’intérêt commun et mutuel. Cette évolution est idéale et nécessite un remaniement en profondeur de la structure familiale pour que les jeunes accèdent à une plus grande autonomie à l’âge adulte.
L’absence de crise, parfois considéré à tort comme salutaire et signe de bonne entente, pourrait déboucher sur des adultes restants dans la dépendance de leurs parents, n’ayant jamais su s’en détacher psychologiquement.

Connaissez-vous
"le complexe du homard" ?
"Le complexe du homard" est a l'origine un livre écrit par Françoise Dolto et sa fille Catherine Dolto; publié en 1989, un an après le décès de la célèbre psychanalyste. C'est de la métaphore du Homard qu'estné le concept de " complexe du homard ". L'ado est alors comparé à la mue du homard dans ces comportements et besoins. Dolto a inventé cette image pour représenter la crise d’adolescence. L’enfant se défait de sa carapace, soudain étroite, pour en acquérir une autre. Entre les deux, il est vulnérable, agressif ou replié sur lui-même.
Durant sa mue, le homard est très fragile et vulnérable, car il perd ainsi toutes formes de protections. Alors, pour échapper aux requins de toutes sortent qui pullulent dans les fonds marins, il n'a plus qu'une idée en tête : Se planquer dans un trou de rocher, sous les algues, jusqu'à ce que repousse sa nouvelle carapace définitive, plus dure, plus coriace, donc plus efficace. Elle démontre ainsi ce que vit un adolescent lors de son passage dans le monde des adultes. Mais elle donne surtout quelques pistes afin d'éviter les pièges et garder toute son énergie... pour faire des choix .
« Ce qui va apparaître est le produit de ce qui a été semé chez l’enfant », avertit Dolto.
Les parents devraient donc voir les crises explosives comme une preuve qu’ils ont rempli leur contrat, les repères éducatifs s’avérant suffisamment souples pour « sauter » au bon moment.
A l’inverse, si les parents sont trop rigides, l’ado restera prisonnier de sa carapace et désarmé face à la dépression.

Comment gérer la crise, renouer le dialogue et apaiser le conflit?
Surprotection, autoritarisme, coaching étouffant : certains parents s'enferment dans des comportements éducatifs adaptés.
Voici quelques conseils pour aborder cette étape délicate de développement de la vie de votre enfant:
1/ Etre capable de se remettre en question en tant que parent:
Vous aurez peut-être du mal à accepter ce conseil. Surtout, si durant sa crise d’adolescence, il ou elle est violent, se rebelle et vous paraît insupportable.
Pourtant, vous devez être capable de vous remettre en cause, de la discussion avec votre ado, jaillira la lumière.
Johann, par exemple, reprochait à ses parents (surtout sa mère) de ne pas être à l’écoute. De ne pas le respecter en tant qu’individu ayant son mot à dire.
En vous remettant en question, vous découvrirez des « points d’ombre ».
Si vous êtes trop sévère, vous pourrez par exemple adoucir un peu les choses.
Si vous être trop permissive, vous pourrez devenir un peu plus strict.
Enfin, si vous n’écoutez pas assez votre ado, vous pourrez commencer à pratiquer l’écoute active et bienveillante des ses besoins.
Petit conseil: Ne nourrissez pas la culpabilité ou la frustration en vous mais au contraire la confiance. Il n'y a pas de parents parfaits, mais des parents suffisamment bons. Prenez du temps pour vous, pour redévelopper une estime de vous en tant que parent, et adulte. Dans quelques courtes années il prendra son envol, et cette séparation est un cap aussi chez les parents.
Apprenez à redevenir indépendant, et autonomes, et montrez l'exemple. Acceptez que vos idéaux soient chamboulés par les désirs naissant de liberté de votre ado.
Acceptez qu'il soient un être différent de vous à présent, et que bientôt il pensera comme un adulte, avec ses points de vue, et ses opinions. Si ce n'est pas déjà fait, cultiver la douceur en vous, en pratiquant une activité physique, du yoga, de la méditation de la pleine conscience.
2/ Rétablir le dialogue:
Ecouter c'est d'abord faire le choix de partager un moment avec votre jeune "à bord de sa voiture de vie". Ecouter c'est comprendre que tous ces mécanismes désagréables que constitue la crise d'adolescence font partie d'un cheminement obligatoire...
Il est difficile voire impossible d’empêcher un ado en crise, de se rebeller. Les adolescents sont partagés entre deux mondes: celui des adultes et des enfants. Ils se sentent mal ou peu aimés.
Il a donc besoin que vous le rassurez de votre amour pour lui.
Essayez de dialoguer très souvent avec lui pour mieux le comprendre. Pour trouver ensemble des solutions à ses problèmes.
Petit conseil: Parlez-lui. Laissez-le vous parler de tout sans tabou, ni gênes.
Mettez en place des moments rituels de paroles et d'écoute au moins régulièrement, si possible de manière spontanés et irrégulière dans le temps.
Cela ne vous empêche pas de garder votre autorité. En revanche vous êtes encore responsable de lui, par conséquent, vous ne devez pas tolérer les abus, mais privilégiez le dialogue. Vous pouvez vous inspirez de la Communication Non-Violente de Marshall Rosenbergh.
3/ Eviter les pièges de la Surprotection:
Beaucoup de parents ont l'illusion qu'ils protègeront toujours leur enfant, ce qui est faux, et rend l'ado encore plus vulnérable. Le passage dans le monde des adultes requiert force et courage, l'autonomie fait parfois peur, mais il doit franchir ses angoisses pour se renforcer et affronter la vie.
En se plaçant entre l'ado et le monde, les parents rendent encore plus difficile son envol et son autonomie. Plus nous tentons de les protéger de tout et moins nous les protégeons en réalité. La surprotection renforce le phénomène de dépendance, et une fois qui ne sera plus dépendant de vous parents, il cherchera substitution chez un autre pour combler ses angoisses, et ne sera jamais vraiment un être autonome et libre!
Pas facile pour des parents angoissés d'entendre cela, mais l'objectif est de laisser l'ado assumer les conséquences de ses actes, notamment dans les situations à faibles risques.
Petit conseil: Autorisez lui des permissions en le mettant responsable de ses actes.
Par exemple lui autoriser une sortie en boîte de nuit avec ses copains ou copines, en lui disant:
" Tu sais ce que je ressent, je suis inquiet, mais j'ai confiance en toi. Je te demande qu'une seule chose, c'est de ne pas monter en voiture avec une personne qui a bu ou fumé."
4/ Pas d'excès d'autorité:
Les parents croient souvent que l'Autorité est indispensable dans tous les cas, et qu'elle garanti l'efficacité et le pouvoir de contrôle, hors elle est un puissant générateur de frustration et de rébellion. Plus en tant que parent vous êtes autoritaire, plus l'ado cherchera à contourner les lois, quitte à désobéir et à mentir. Persister dans une attitude autoritaire est néfaste. Le risque, c'est l'escalade du conflit, pouvant conduire à la perte de la relation.
Les ados peuvent vouloir s'enfuir, quitter brusquement la maison, et compenser par un mode de vie d'addiction et de débauche.
Petit conseil: En cas de crise dans la relation avec votre ado, il est primordial d'assouplir le cadre d'autorité. Lâcher du lest est très important. Vous devez prendre gagner en confiance, l'objectif est d'accepter de prendre le risque que l'ado fasse ce que vous redoutez. Laissez le explorer la vie. Faites une liste des interdits les plus fréquents sur une feuille de papier, et régulièrement, faites une sélection de certaines permissions nouvelles à lui accorder, ces expérimentations sont très importantes pour qu'il puissent renforcer ces ailes pour quitter le nid familial et prendre bientôt son envol... Permettez votre enfant d'expérimenter la nouveauté qui lui est accordé, dialoguez régulièrement, et faites lui comprendre que s'il se retrouve face à une difficulté, ou qu'une situation lui est hors de contrôle. Ainsi, vous pourrez de nouveau faire preuve d'autorité.
5/ Eviter le coaching étouffant:
Si vous passez votre temps à " montrer le bon exemple à suivre ", en voulant suivre votre idéal de vie, vous ne ferez que nourrir un fantasme alors irréalisable, et votre ado va tout simplement intégrer qu'il est incapable de faire tout seul, estimant ne pas en avoir les ressources ou l'énergie.
Une telle posture ne facilite pas son envol. Il va progressivement perdre sa confiance n en lui, mais plus encore, ses conseils martelés et systématiques, vont le pousser à ne plus écoutez du tout vos messages.
Petit conseil: Fixez-vous l'objectif durant une semaine pour commencer de tenter d'écouter votre ado en vous retenant de lui donner le moindre conseil. L'ado va alors trouver par lui-même ses propres solutions, et prendre conscience qu'il est capable d'agir par lui-même. Vous allez voir, bien souvent, les résultats sont spectaculaires.
J'espère que cet article vous a éclairé sur certains points, et va vous aider à mieux interagir avec votre ado. Pensez à vous abonner pour recevoir plus d’exercices et de conseils en psychologie et développement personnel et partagez à ceux à qui cet article pourrait profiter!
Merci à vous pour votre contribution et à très bientôt!
Alexandre JEROME // Sophroanalyse34
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